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lundi 8 octobre 2012

En attendant Godo - Les Principes Brechtiens


Je me souviens avoir glissé du théâtre de l'absurde au théâtre de Brecht, en travaillant la pièce suivante à la manière de ce dernier, je vous laisse lire le texte de départ et vous faire un idée de ce que cela pouvait donner par un rappel des principes du théâtre de Brecht qui vont suivre :

Le théâtre de l'absurde issue de la tradition propose une forme de modernité pour l'époque.


Auteurs : Ionesco (Roumain), Beckett (Irlandais), Adamov (Russe).

En attendant Godot a été publié en 1952 par Samuel Beckett (prix Nobel de littérature 1969), narre l'attente de deux personnages étranges : Vladimir et Estragon. 

Le titre est énigmatique : gérondif, on dirait qu’il ne se passe rien « en attendant ».

La scène d'exposition de En attendant Godot s'inscrit dans la modernité et est déroutante pour le spectateur.


Samuel Beckett






Lecture du texte 

Route à la campagne, avec arbre.
Soir.
Estragon, assis sur une pierre, essaie d'enlever sa chaussure. Il s'y acharne des deux mains, en ahanant. Il s'arrête, à bout de forces, se repose en haletant, recommence. Même jeu.
Entre Vladimir.

ESTRAGON (renonçant à nouveau) : Rien à faire.
VLADIMIR (s'approchant à petits pas raides, les jambes écartées) : Je commence à le croire. (Il s'immobilise.) J'ai longtemps résisté à cette pensée, en me disant, Vladimir, sois raisonnable. Tu n'as pas encore tout essayé. Et je reprenais le combat. (Il se recueille, songeant au combat. A Estragon.) Alors, te revoilà, toi.
ESTRAGON : Tu crois ?
VLADIMIR : Je suis content de te revoir. Je te croyais parti pour toujours.
ESTRAGON : Moi aussi.
VLADIMIR : Que faire pour fêter cette réunion ? (Il réfléchit.) Lève-toi que je t'embrasse. (Il tend la main à Estragon.)
ESTRAGON (avec irritation) : Tout à l'heure, tout à l'heure.
Silence. 
VLADIMIR (froissé, froidement) : Peut-on savoir où monsieur a passé la nuit ?
ESTRAGON : Dans un fossé.
VLADIMIR (épaté) : Un fossé ! Où ça ?
ESTRAGON (sans geste) : Par là.
VLADIMIR : Et on ne t'a pas battu ?
ESTRAGON : Si... Pas trop.
VLADIMIR : Toujours les mêmes ?
ESTRAGON : Les mêmes ? Je ne sais pas.
Silence. 
VLADIMIR : Quand j'y pense... depuis le temps... je me demande... ce que tu serais devenu... sans moi... (Avec décision) Tu ne serais plus qu'un petit tas d'ossements à l'heure qu'il est, pas d'erreur.
ESTRAGON (piqué au vif) : Et après ?
VLADIMIR (accablé) : C'est trop pour un seul homme. (Un temps. Avec vivacité.) D'un autre côté, à quoi bon se décourager à présent, voilà ce que je me dis. Il fallait y penser il y a une éternité, vers 1900.
ESTRAGON : Assez. Aide-moi à enlever cette saloperie.
VLADIMIR : La main dans la main on se serait jeté en bas de la tour Eiffel, parmi les premiers. On portait beau alors. Maintenant il est trop tard. On ne nous laisserait même pas monter. (Estragon s'acharne sur sa chaussure.) Qu'est-ce que tu fais ?
ESTRAGON : Je me déchausse. Ça ne t'est jamais arrivé, à toi ?
VLADIMIR : Depuis le temps que je te dis qu'il faut les enlever tous les jours. Tu ferais mieux de m'écouter.
ESTRAGON (faiblement) : Aide-moi !
VLADIMIR : Tu as mal ?
ESTRAGON : Mal ! Il me demande si j'ai mal !
VLADIMIR (avec emportement) : Il n'y a jamais que toi qui souffres ! Moi je ne compte pas. Je voudrais pourtant te voir à ma place. Tu m'en dirais des nouvelles.
ESTRAGON : Tu as eu mal ?
VLADIMIR : Mal ! Il me demande si j'ai eu mal !
ESTRAGON (pointant l'index) : Ce n'est pas une raison pour ne pas te boutonner.
VLADIMIR (se penchant) : C'est vrai. (Il se boutonne.) Pas de laisser-aller dans les petites choses.
ESTRAGON : Qu'est-ce que tu veux que je te dise, tu attends toujours le dernier moment.
VLADIMIR (rêveusement) : Le dernier moment... (Il médite) C'est long, mais ce sera bon. Qui disait ça ?
ESTRAGON : Tu ne veux pas m'aider ?
VLADIMIR : Des fois je me dis que ça vient quand même. Alors je me sens tout drôle. (Il ôte son chapeau, regarde dedans, y promène sa main, le secoue, le remet.) Comment dire ? Soulagé et en même temps... (il cherche) ...épouvanté. (Avec emphase.) E-POU-VAN-TE. (Il ôte à nouveau son chapeau, regarde dedans.) Ca alors ! (Il tape dessus comme pour en faire tomber quelque chose, regarde à nouveau dedans, le remet.) Enfin... (Estragon, au prix d'un suprême effort, parvient à enlever sa chaussure. Il regarde dedans, y promène sa main, la retourne, la secoue, cherche par terre s'il n'en est pas tombé quelque chose, ne trouve rien, passe sa main à nouveau dans sa chaussure, les yeux vagues.) Alors ?
ESTRAGON : Rien
VLADIMIR : Fais voir.
ESTRAGON : Il n'y a rien à voir.

En attendant Godot - Samuel Beckett - Scène d'exposition (extrait)


Et puis il y a eu cette présentation :

Description de cette image, également commentée ci-après
Bertolt Brecht en 1948


Les grands principes du théâtre de Brecht sont (extrait copié-collé du blog de l'option théâtre du Lycée Artaud ici en bordeaux suivi de Karma Detchen : commentaires pour faire un parallèle avec la pratique bouddhique - qui ne sont que mon humble compréhension ou vue du moment basés sur mon peu d'expérience ceci dit) :


• Le refus du théâtre traditionnel. Brecht refuse le théâtre traditionnel, en usage en Occident depuis les théories du philosophe grec Aristote (384-322 av. J. - C.), reprises depuis le XVIIème siècle comme la seule conception possible. La conception aristotélicienne veut que le théâtre doit se fonder sur l'illusion et l'identification : l'action théâtrale plonge le spectateur dans quelque chose qui implique son affectivité et épuise son activité intellectuelle. Brecht appelle cela « théâtre dramatique »
Karma Detchen : c'est un moyen habile ancestral utilisé dans le véhicule Mahayana pour se mettre à la place d'autrui et développer l'Empathie, la Compassion, la Grande Compassion jusqu'à la Bodhicitta, l'Esprit d'Eveil. 

• Les propositions de Brecht. Au contraire des théories aristotéliciennes, Brecht pense que le théâtre doit être « mis au service d'une véritable pédagogie sociale » (J. Scherer) : au lieu d'impressionner le spectateur par un spectacle où il se plonge, en attente du dénouement, il s'agit d'exercer son esprit critique, de l'aider à se mettre en position d'étude de l'homme et de la société. Ainsi, en allant au théâtre, le spectateur peut réfléchir à la façon d'agir sur la réalité pour la changer. C'est une conception socio-politique du théâtre, qui selon Brecht peut et doit changer le monde. Brecht appelle cela « théâtre épique »
Karma Detchen : outre l'exercice des joutes philosophiques, cela correspondrait à la méditation en action, où l'on passe des vertus transcendantes nominales aux vertus transcendante authentiques, le théâtre de la retraite du yogi ou de la yogini sert d'entrainement à cela. Cependant, nous ne changeons pas le monde extérieur mais notre monde intérieur de manière à nous libérer du mode d'être qui juge, conçoit, ignore à un mode d'être qui comprend intimement, voit purement sans affect, et reconnaît l'unité des êtres dans leur diversité, pour accompagner accueillir et si possible soigner les souffrances relatives et fondamentale. En travaillant intérieurement dans ce détachement et cette distanciation pour une représentation extérieure, tel un guide l'acteur et/ou le metteur en scène oeuvre(nt) interactivement (ce qui est plus flagrant dans le théâtre interactgif ou d'improvisation) à la libération du spectateur qui devient acteur civiqueCar comme dit A-M. Rilke (pardonnez ma traduction résumée de mémoire) "art exige autant du simple spectateur ou amateur que du créateur ou acteur qui s'expose" et dans son grand théâtre au sein des existences conditionnées, la Vie est un Art à part entière où la loi du karma est puissante. 

• Les techniques du théâtre brechtien. Le théâtre épique nécessite de nouvelles techniques d'écriture, de mise en scène, de jeu d'acteur. À tout moment le spectateur doit se rappeler qu'il est au théâtre. Cela s'appelle la distanciation (en allemand, Verfremdungseffekt, ou effet d'étrangeté) : ce qui se passe sur la scène m'est étranger, je peux l'observer extérieurement sans que mes sentiments m'empêchent de réfléchir.
Karma Detchen : cela est identique à la protection de la Vue, du Vajrayana au Dzogchen, ou celle du Refuge du Hinayana au Mahayana.
— Techniques d'écriture. L'accent est mis non sur le dénouement de la pièce, mais sur son déroulement, même s'il est sinueux. Le spectateur doit rester en éveil. Ainsi, Brecht met au point avec son collaborateur le musicien Kurt Weill la technique des Songs, morceaux chantés introduisant une rupture dans le déroulement de la pièce, où les personnages rappellent les enjeux de l'action comme en les commentant. Certaines de ces Songs sont devenues des classiques de la chanson populaire ou des standards de jazz, comme « La Complainte de Mackie » de L'Opéra de Quat'sous.
Karma Detchen : autrement dit comme dans le Lam Khyer du Lam Rim, qui préconise de tourner bonheurs et douleurs ou adversités en sources d'éveil sur la voie progressive vers l'éveil, le "but est le chemin" lui même, quel qu'il soit et c'est là que se trouvent toutes les sources de libérations extérieures, intérieures et secrètes.
— Techniques de mise en scène. Le cadre général est schématisé. On utilise des pancartes exposant le cadre spatio-temporel ou expliquant la signification de l'épisode, on recourt à des histoires enchâssées comme dans Le Cercle de craie caucasien, les figurants font des mouvements pas forcément en accord avec l'action présente, etc.
Karma Detchen : c'est un moyen utilisé aussi par nos maîtres de folle sagesse afin de subjuguer l'esprit ordinaire, tout comme les koans souvent déconcertants du Zen, ou les actions éveillées diverses et spontanées de nos maîtres Dzogchenpai pour nous présenter directement Rigpa (la nature de notre esprit éveillé, ou conscience pure). 
— Techniques de jeu d'acteur. À aucun prix l'acteur ne « se met dans la peau du personnage ». Il doit montrer qu'iljoue, et ne doit pas essayer de faire croire qu'il est. D'ailleurs, la distanciation (Verfremdungseffekt, ou « effet-V. »), qui s'oppose à l'identification (Einfühlung), n'a pas été inventée par Brecht. Dès les origines du théâtre, en Occident ou ailleurs, on en trouve des manifestations dans les théâtres avec masques, décors de carton-pâte, clins d'œil de connivence au public, etc. 
Karma Detchen : comme par exemple les Cozzi de la Comedia dell"Arte, les Guignols etc, la chanson de geste du moyen âge. Bref, Brecht rajeuni et modernise en politisant, on reste cependant dans un usage conditionné et conditionnant du théâtre, mais on peut aussi prendre cet appuis pour aller vers un théâtre Dharma, les Lhamo en sont l'exemple également le théâtre No qui peuvent offrir ces niveaux de vue transcendante, mais dès lors qu'on a la Vue la vie nous paraît comme Le théâtre Cosmique comique parfois malgré le samsara à cause du samsara et de la nature ou sa source car on en perçoit réellement les jeux d'illusion. 

• Portée politique. Chez Brecht, l'effet-V. s'accompagne d'une volonté politique d'inspiration marxiste : la réalité est altérée par la société d'exploitation ; cette réalité m'aliène : mais si je m'en distancie, je commence déjà à m'en désaliéner. Selon Brecht, le théâtre est révolutionnaire puisqu'il permet de se libérer de l'exploitation 
Karma Detchen : autrement dit ce théâtre est thérapeutique au niveau social, voire sociétal, mais on peut l'utiliser pour se distancier soit de la maladie qui peut nous toucher en plein Samsara (caractérisé par la souffrance) pour nous rappeler la nature conditionnée du Nirvana (exempt de souffrances) si on s'y complaît comme un dieu oisif en oubliant la cause de l'éveil que sont les êtres sensibles, et donc pour se libérer de cette douce maladie qu'est le mode d'être conditionné du Samsara au Nirvana inclus, et ce que nous permettent les moyens habiles du Vajrayana de base au Dzogchen qui priviligie la vue pure de toute altération ou conditionnement. Bref j'ai la chance d'avoir un maître qui est un très bon acteur éveillé pour ne pas dire comédien éveillé qui ne se prend pas pour un bouddha mais qui nous conseille de le voir tel, de manière à exercer en ce sens nos neurones miroir. car nous sommes ici et maintenant dans un mode d'être conditionné et cela jusqu'à notre mort dès que nous naissons, jusqu'à l'éveil si nous le réalisons en cette vie ou, avec le juste entrainement, au moins au moment de notre mort pour ne pas retomber dans le cycle des existences sans fin poussés par notre karma (nos actions), nos actions éveillées nous permettent cependant de renaître conscient et connaissant du mode d'être samsarique sans toutefois en souffrir mais avec les moyens d'aider et guider les êtres dignement vers leur propre libération. 

Puisse cela être notre noble motivation, acteurs, chanteurs et danseurs qui vivons dans les champs d'illusions, sarva mangalam !

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